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Le blog de Susanna Huygens
Articles récents

La magie des grandes eaux au Grand Trianon à Versailles

18 Août 2014 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Versailles

Grandes eaux trianon 038A Versailles, il y a les Grandes Eaux du parc, ou plûtot du Petit Parc, autour du château, accompagnées par de la musique qui résonne dans tous les hauts parleurs placés à des endroits stratégiques et il y a celles du Grand Trianon qui ne sont données que deux à trois fois par an, sans autre musique que celle de l'eau, du vent, des murmures des feuillages et du chant des oiseaux. Ce sont les Grandes eaux, telles que les a connues Louis XIV. Pure féérie que je vous invite à découvrir en quelques photos.
Avec d'abord le jet central du Fer à cheval qui donne sur le Grand Canal.
Cette année ces Grandes Eaux ont été données pour le 15 août et nous les retrouverons pour les journées du Patrimoine.
La fragilité du réseau hydraulique et des bassins ne permet pas de les donner plus souvent. Par ailleurs, les fontainiers pris par celles du parc, ne disposent à cette occasion que de une heure trente pour nous les offrir, qu'ils en soient remercier. Car ces Grandes Eaux de Trianon, vous permettront de redécouvrir la vraie magie de ce métier unique.

 

Tendez l'oreille, ouvrez grand les yeux et laisser à l'enfant qui sommeille en vous suivre les chemins qui vous mèneront aux Sources. 

 

JGrandes-eaux-trianon-017.JPG'avoue qu'en arrivant vers midi, je pensais avoir tout vu à Versailles et qu'il me serait donc difficile d'être encore émerveillé, tant la foule qui se bouscule dans les allées du parc et les Grands Appartements fini par rendre le lieu assez insupportable. La chance du Grand Trianon, c'est qu'il n'a quasi pas connu Marie-Antoinette, que son ameublement empire n'attire pas autant les touristes et que son état général, en fait en quelque sorte le château de la Belle au Bois Dormant. Et c'est tant mieux, car l'on peut encore s'y promener sans être bousculé, entendre les oiseaux chanter, y apercevoir une faune sauvage (comme les hérons qui fuient désormais les abords du Grand Canal, les faucons... Ici pour un peu, certains jours de brouillards on pourrait presque croiser des fantômes).
Grandes-eaux-trianon-037.JPGAlors chaque visite, nous y offre le vrai plaisir d'une solitude toute relative mais oh combien paisible, dans cet endroit où la beauté et l'harmonie règnent encore. 
Le Grand Trianon, c'est vous savez celui qui a remplacé en 1687, le petit Trianon de Porcelaine. Ce dernier trop fragile, ne résistait pas aux intempéries. Sans compter que celle pour qui il fût conçu, Mme de Montespan, avait été répudiée, laissant sa place à la Belle Indienne, Mme de Maintenon. 

On doit le Trianon que nous connaissons aujourd'hui, à Jules - Harduin Mansart, l'architecte du roi, dont Le Nôtre considérait qu'il faisait fort bien son métier de... Maçon. Alors s'il nous prend parfois à regretter de ne pouvoir voir ce petit palais, dont "l'exotisme" tout relatif devait être particulièrement ensorcellant, ce palais de marbre n'en possède pas moins de charmes.
Grandes eaux trianon 066Quant à ses jardins, s'ils ont beaucoup souffert du temps qui passe et des tempêtes, ils restent un enchantement.
Grandes-eaux-trianon-080.JPGVoici deux photos du bassin du Plat fond. Ce dernier est situé dans le fond du Jardin en face du palais. Il est orné de deux dragons sur les côtés et de deux sculptures en bronze, deux amours s'amusant sur deux ilôts jonchés de coquillages de François Girardon.
Si nous devons le palais du Grand Trianon à Mansart, c'est bien  Le Nôtre qui dessina les jardins. Mais avant lui une famille de jardiniers fidèles au domaine du Roi y travailla. Parmi eux, Michel II Le Bouteux  (1623-entre 1696/1716). Issu lui aussi d'une famille de jardinier, il avait en charge les fleurs et les orangeries.
Et c'est l'une des particularités de ces jardins du Grand Trianon. Contrairement à ceux du parc, les fleurs y tenaient une place essentielle. Elles embaumaient l'air porté par les vents. Les jardiniers d'aujourd'hui vieillent avec un grand soin à nous en rendre tous les sortilèges.
Samedi, comme au temps du Roi Soleil, les fontainiers ont comme leurs illustres prédecesseurs, équipés d'une clé lyre fait jaillir les mystères des eaux. La magie opère instantanément. L'eau, la terre et l'air s'en sont donnés à coeur joie, ce 15 août pour nous emporter dans des instants de pures fantasmagories. Soleil et nuages, jouant à cache-cache, nous onGrandes-eaux-trianon-056.JPGt invité à vibrer, sur un univers où la nature accepte de se laisser apprivoiser pour mieux transcender les éléments.
Le superbe Buffet d'eau, bassin de marbre que l'on doit à Mansart, chante sur plusieurs registres, tandis que du jet "du plat font" (voir plus haut) émane un grondement tellurique.
Grandes eaux trianon 103Les nymphes vous grisent de leur chant et de leurs danses et aux Sources, l'ancien bosquet aujourd'hui disparu, semble murmurer des souvenirs et des ris, d'un temps ancien. Des enfants jouent au milieu de dieux et déesses qui viennent vous inviter à oublier le temps présent, à redécouvrir un univers sans autre bruit que celui des coeurs qui battent à l'unisson de l'univers.

Par Monique Parmentier, article et photos.

 

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Fontfroide : un chant d'amour

7 Août 2014 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Divers

narbonne-ete-2014-329-copie-1.JPGnarbonne-ete-2014-209.JPG

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

J'ai mis beaucoup de temps à revenir, car du temps j'en avais "besoin". J'avais mis la musique entre parenthèses, car certaines blessures non cicatrisées donnaient au mot "partage", une connotation destructrice.

 

narbonne-ete-2014-284.JPGIl me fallait retrouver le temps. Un temps qui s'arrête ou prend le temps de s'écouler avec les sources claires, loin des menteurs et des manipulateurs croisés sur des chemins bien moins lisses qu'ils n'auraient du être.

 

Lorsque j'ai commencé à écrire sur la musique, lorsque je me suis engagée dans le bénévolat à Versailles, je pensais ne croiser, bien trop innocement je pense, que des personnes passionnées avec qui "partager" l'amour du beau, un amour qui rend généreux, crée un dialogue entre culture, ouvrant les horizons.

 

Concernant Versailles, j'ai récemment rayé de mes amis, un escroc. Un manipulateur que j'ai heureusement vu venir, contrairement à celui croisé en écrivant des chroniques musicales.

 

narbonne-ete-2014-332.JPGIl m'a fallu du temps, beaucoup de temps et c'est à l'Abbaye de Fontfroide, durant le festival Musique & Histoire qu'en juillet, il s'est enfin arrêté. Là au milieu de la garrigue, en soirée, une soirée recouverte par les nuages, le vent a chanté et l'a suspendu. Le vent et les violes de Jordi Savall et Philippe Pierlot !

 

Il m'arrive encore de revoir dans mes rêves cet instant. Lorsque enfin, j'ai osé vaincre ma peur de partir seule dans les collines.

 

Des nuages bas les recouvraient. L'orage menaçait. La nuit pourtant encore lointaine semblait vouloir s'en emparer. Un vent aux senteurs lourdes les écrasait. Il était l'heure de dîner, avant un concert prévu à 21 h 30.

 

Pourtant quelque chose m'appelait dans ces collines. Alors, j'ai répondu à cet appel.

 

narbonne-ete-2014-372.JPGPourquoi est-il si difficile de vous faire entendre cet instant où l'harmonie a chanté ? Je ne saurais précisément vous le dire. Mes photos n'y parviendront pas plus. Je marchais, marchais. A chaque pas, je me disais, en voyant un arbre, une tour de guet, je vais aller là-bas et je m'arrêterais. Mais je ne parvenais pas à m'arrêter. Mon souffle restait léger pourtant, alors qu'asthmatique, je respire mal dès que je fais un effort. Je ressentais la caresse de l'air. La beauté du chemin me poussait à continuer. Et puis, ... je ne saurais dire précisément pourquoi, je me suis retournée. J'ai d'abord perçu le sifflement du vent qui parcourait la garrigue, puis aperçu un oiseau de proie qui survolait la forêt plus haut. Le vent sifflait t-il vraiment ou chantait-il ? ou... il me semble encore qu'il parlait, tout comme au loin ces voix des violes de Jordi Savall et de Philippe Pierlot qui répétaient encore et encore. J'ai su alors que j'étais arrivée. Que le poids du chagrin était resté sur le chemin. Oui j'ai su que j'étais arrivée et que désormais, la peur avait disparu, qu'elle n'avait plus lieu d'être. Longtemps, longtemps, longtemps... Je suis restée là. Une éternité. Savourant l'harmonie, celle de la Terre Mère. Et puis les voix des violes se sont perdues, suspendues. Il m'a fallu redescendre. Pourtant, je sais désormais qu'une partie de moi est là-bas. Sur ce chemin, je retournerais.

 

narbonne-ete-2014-019.JPGDu festival Musique & Histoire, pour un dialogue interculturel, je garde bien plus que des mots, ou que mes trois articles. Deux pour Classique News : Chants d'exil et d'amour et Une source d'harmonie et le dernier pour ODB que je n'ai pas titré, parce qu'il est difficile de laisser partir, cette harmonie.

Ce bien plus, s'appelle de belles rencontres, avec de merveilleux artistes et aussi toutes ces belles personnes croisées à l'abbaye et à Narbonne. Jamais, je n'ai reçu un accueil aussi chaleureux, vu tant de belles choses. Narbonne est une ville dont la beauté, la générosité est à l'image de ses musées et de ses gourmandises.

 

narbonne-ete-2014-024.JPGUne ville où le sud,vous sourie et où souffle un vent qui fait vibrer la lumière. Une ville où dans ses rues on ressent un bien-être devenu rare. Sous les Halles, une merveille architecturale, la convivialité est à l'image de ses restaurateurs et de ses commerçants, dorée comme son miel. Fille du nord, je ne me suis jamais sentie intruse, avec mon accent pointu de parisienne.

 

 

 

 

 

 

 

narbonne-ete-2014-216.JPG

Les Corbières me manquent. Narbonne me manque. Fontfroide et sa source d'harmonie qui s'écoule désormais dans mes veines m'appellent.

 

Par Monique Parmentier

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Journal d'un départ : la beauté existe

25 Mai 2014 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Divers

mazarinOui, elle existe, ce soir j'ai connu une nuit magique, faîte de beauté. J'ai découvert l'envoûtement des nuits d'Orient à Versailles. Invité à l'inauguration officielle de l'exposition de la Chine à Versailles, cet évènement m'a fait oublier le quotidien. Voici quelques photos de cette superbe exposition que j'ai réalisées. A voir, pour tous ceux qui aiment les porcelaines et le jade. Bonne nuit aux pays des horizons lointains.

 

   
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    27-mai-036.JPG

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Journal d'un départ

24 Mai 2014 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Poésie et Littérature

J'écris peu et n'écoute souvent en ce moment que du luth et du piano, Hopkinson Smith et Murray Perahia. Des soucis qu'il me faut régler, un déménagement à préparer, une remise à plat avant de rejoindre d'autres horizons. Reviendrais-je ? Probablement. Sous une autre forme, peut-être. Je ne sais.:

Je lis et prend le temps. Je tombe ainsi sur un poème de Jorge Luis Borges, qui m'a beaucoup marqué adolescente pour son Livre de sable. Il s'agit ici d'un poème que je vous livre : ABSENCE

Il me faudra soulever la vaste vie

qui est encore ton miroir :

Il me faudra la reconstruire chaque matin.

Depuis que tu es partie

combien d'endroits sont devenus vains

et dénués de sens, pareils

a des lumières dans le jour.

Soirs qui furent abris pour ton image,

musiques où toujours tu m'attendais,

paroles de ces temps là,

il me faudra les brisés avec les mains.

Dans quel creux cacherais-je mon âme

pour ne pas voir ton absence

qui comme un soleil terrible, sans couchant,

brille définitive et impitoyable ?

Ton absence m'entoure

Comme la corde autour de la gorge.

La mer où elle se noie.

 

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Photos de la Méridienne

4 Mai 2014 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Versailles

meridienne3.jpg

La Société des Amis de Versailles a déjà participé à la restauration de pièces du château. Depuis le début de l'année 2014, c'est la Méridienne, ou Boudoir de la Reine, pièce qui se trouve à l'arrière de la chambre de la Reine qui fait l'objet d'une restauration portant sur les boisseries, les planchers, la mise en sécurité de la pièce. Une deuxième tranche de travaux devrait par la suite concerner les tissus. Cette pièce est un petit bijou, offert par le Roi à la Reine, elle est le reflet des arts décoratifs extrêmement fins et délicats qui donnent à cette période de l'histoire de l'art, toute sa grâce. Les métiers d'art à l'époque y réalisent de nombreuses prouesses, d'autant plus que la pièce du être réalisé en un temps record.

En attendant, un article plus précis, voici quelques photos que j'ai réalisé lors d'une visite de chantiers :

 

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Depuis quelques temps, comme je vous l'avais écrit précédement, je ne couvre plus que quelques concerts pour Classique news et ODB Opéra. Avec le temps, je me rends compte combien cela me convient. Et jusqu'à la rentrée, il en restera ainsi. Je trouve sur ces deux sites mon équilibre t et je retrouve du temps pour lire et surtout organiser un déménagement prochain.

meridienne4.jpgméridienne5-copie-1

 

C'est encompagnie de Murray Perahia, que je vous offre ces photos, témoignage d'un travail merveilleux. Je retrouve ainsi ce temps de la simple écoute, loin de la surproduction d'articles. Depuis que le manipulateur toulousain a disparu de ma vie, j'ai compris combien, mon amour de la musique, se contentait du rare. Tancrède de Campra, mardi prochain devrait ainsi m'apporter de belles émotions.

 

meridienne6.jpgmeridienne7.jpg

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L'intense clarté des Te Deum

26 Janvier 2014 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Chroniques CD

te_deum.jpgTe Deum Lully /Charpentier

Alpha/Vincent Dumestre - Le Poème Harmonique

 

J'ai à deux reprises eu l'occasion d'entendre en concert et de commenter cette nouvelle version par le Poème Harmonique, des Te Deum de Lully et de Charpentier. La première lors du Festival de Saint-Denis en juin 2011, puis lors du concert donné à la Chapelle Royale le 24 mars 2013, dont la captation fait aujourd'hui l'objet de ce CD.

S'il est vrai que le Poème Harmonique nous a jusqu'ici habitué à des répertoires plus rares, cet enregistrement jubilatoire démontre une fois de plus, que les œuvres musicales que l'on croit le mieux connaître, peuvent nous redévoiler des beautés insoupçonnées, si des interprètes de talent s'en emparent. Et un peu comme un restaurateur devant une toile de Poussin que des siècles de poussières auraient recouverts, Vincent Dumestre redonne tout son éclat à la musique du Roi Soleil.

En s'associant avec Château de Versailles Spectacles, Alpha nous permet de retrouver certains des magnifiques concerts donnés en ces lieux qui demandent bien plus d'intuition et d'écoute aux artistes que bien d'autres salles de concerts. C'est à la Chapelle Royale, dont l'acoustique réverbérante peut parfois poser problème aux moins aguerris, que Vincent Dumestre et le Poème Harmonique ont enregistré ce nouveau CD. Ces Te Deum - "Dieu, nous te louons"- étaient à l'origine conçus pour célébrer de grands événements. Et celui de Charpentier retenu ici - H 146- puisqu'il en existe un autre, ne déroge pas à la règle, puisqu'il fût composé en 1692 pour marquer une victoire des armées du Roi. En revanche, celui de Lully le fût en 1677 pour louer non une naissance royale mais celle du fils du compositeur, dont le Roi fût le parrain.

 

anges2C'est avec le plus célèbre aujourd'hui des deux Te Deum de Charpentier, celui dont les premières mesures ont été utilisées pendant plusieurs années par l'Eurovision, que s'ouvre ce CD. C'est peut - être parce que Vincent Dumestre a le courage avec ses musiciens de prendre des risques en utilisant des trompettes à l'embouchure ancienne, que dès les premières mesures, on oublie cet apport du XXe siècle à la redécouverte du plus italien des compositeurs français. Brillantes et triomphantes, elles résonnent avec ferveur et sont tout comme les timbales d'une réelle magnificence, à l'image de ce qui suit.

La fluidité et la souplesse de la direction de Vincent Dumestre, semble répondre à la demande du roi vieillissant qui ne voulait être entouré que d'images de la jeunesse. Il redonne à ces deux Te Deum leurs caractère dansants, aux contrastes et couleurs flamboyants. La lumière qui émane des musiques de ces deux grands maîtres y miroite de mille feux intenses et sensuels. A leur instrumentation fastueuse, répond une exubérance vocale, qui trouve dans les solistes du Poème Harmonique et dans le chœur - la Capella Cracoviensis- des interprètes accomplis. L'engagement plein de fraîcheur et de passion du chœur venant tout droit de Pologne est un vrai bonheur tant ils font merveille dans ce genre bien français du Grand Motet.
Les timbres des solistes sont parfaitement appariés et permettent en particulier des duos quasi extatiques comme dans le Dignare Domine que ce soit chez Charpentier ou Lully. Le jeune haute-contre Reinoud van Mechelen et la basse Benoît Arnould s'autorisent dans celui de Lully des inflexions, des nuances d'une tendre noblesse et d'une véritable sensibilité à fleur de peau. Tandis qu'avec la soprano Amel Brahim-Djeloul au timbre fruité, le duo avec la basse, est un instant de pure poésie. Mais il ne faut surtout pas oublier les deux autres solistes, Aurore Bucher et Jeffrey Thompson qui participe, tout aussi bien par leur déclamation que par leurs qualités vocales, à la réussite de ce superbe travail de troupe.

 

Cette version tout à la fois dramatique et ardente de ces deux Te Deum trouvera tout naturellement sa place dans votre cœur. Une prise de son ample et généreuse, qui met en valeur les voix et un livret où le texte clair et passionnant, d'Alexandre Maral, conservateur en chef du Château de Versailles et grand spécialiste de la Chapelle Royale, ainsi que les notes d'intentions de Vincent Dumestre, vous permettront de savourer cette musique dont la clarté illuminera les journées les plus grises.

 

Par Monique Parmentier

1 CD Alpha -  Marc - Antoine Charpentier (1643-1704) Te Deum H 146 et Jean - Baptiste Lully (1632-1687), Te Deum LWV 55. Amel Brahm-Djelloul, Aurore Bucher, Reinoud Van Mechelen, Jeffrey Thompson, Benoît Arnould.Le Poème Harmonique & Capella Cracoviensis. Direction, Vincent Dumestre - Durée : 55'34'. Enregistré à la Chapelle Royale à Versailles le 24 mars 2013 - Textes livret : Français - Anglais - Allemand - Rer : Alpha 952 - Code barre : 3 760014 199523

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Attaingant, auprès de vous : à la lueur des étoiles

19 Janvier 2014 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Chroniques CD

cd_ecl_1301.jpgAttaingnant, Auprès de vous, Pierre Gallon L'Encelade

Nous devons l'une des plus jolies surprises de ce début d'année, à un jeune label spécialisé dans la musique baroque, et tout particulièrement dans la musique pour clavier, l'Encelade. Leur démarche pour le moins audacieuse en ces temps de crise, leur permet d'offrir aux artistes la liberté d'aller chercher dans les bibliothèques, des petites merveilles qui ne demandent qu'à vous apporter tout à la fois du plaisir et l'harmonie d'instants volés à la modernité.

Alors que la Renaissance n'a jamais été autant fêtée dans différentes expositions parisiennes et internationales, y compris sa musique, le claviciniste et organiste Pierre Gallon, nous offre ici de découvrir non pas un compositeur, mais des œuvres éditées par l'imprimeur du Roi français le plus fastueux de cette période, François Ier. Cet imprimeur avait pour nom Pierre Attaingnant. Si l'on sait peu de choses du personnages, il tint en revanche une place essentielle dans l'origine de l'édition et de la diffusion musicale en France et en Europe. Il entretenait des rapports étroits avec les musiciens de la cour comme Sermisy et sa production imprimée tend à démontrer combien l'activité musicale devait être importante à cette époque. Clément Janequin ou Pierre Sandrin figuraient également parmi les compositeurs dont il contribua à faire connaître le travail, tout comme celui de musiciens qui n'étaient pas rattachés à la cour, mais à des églises parisiennes, comme Notre Dame ou la Sainte Chapelle. 

 

bibliothequeversailles.jpgDe la chanson française qui en France durant la Renaissance occupait une place de premier plan, aux motets et à la transcription de chansons et danses pour instruments, son atelier est d'une telle importance, que sans lui bien des œuvres de cette période cruciale dans l'histoire de la musique auraient aujourd'hui disparu. Si certains noms des compositeurs des pièces éditées nous sont parvenus, beaucoup sont anonymes.

Des CD consacrés particulièrement à la chanson existe déjà. Doulce Mémoire a contribué à leur redécouverte. Il existe également des pièces pour luth enregistrées par Hopkinson Smith. Ici, ce sont donc un certain nombre de pièces pour clavier que Pierre Gallon nous invite à découvrir. Il les replace dans le contexte de l'urgence de la Réforme qui pousse les églises catholiques à construire des orgues, afin de contrer autant que faire se peut, le développement du protestantisme.

Aux pièces d'origine religieuse, il mêle des chansons (dont il nous livre les textes dans le livret) et des danses. Seul pour l'essentiel, il est toutefois accompagné par deux autres musiciens, nous donnant ainsi parfois le sentiment de retrouver la ferveur ou la joie de ces petits comités de musiciens, souvent des particuliers, qui se réunissaient pour partager ces instants sacrés où la musique cessant d'être divine devient humaine.

Un charme incomparable opère dès le Prélude. Le choix des instruments, virginal et luth au pouvoir évocateur si féerique ou claviorganum si fascinant dans ce chant des deux mains, -droite pour le clavecin et gauche pour l'orgue-, est une invitation à s'éloigner, à se ressourcer loin de l'agitation et de la brutalité de l'actualité. Pierre Gallon nous invite dans des ailleurs aux pavanes mélancoliques et aux gaillardes énergiques. Les perles cristallines du virginal, la ductilité des instrumentistes (Pierre Gallon et Freddy Eicheberger), créent un climat serein, joyeux ou d'une douceur empreinte de nostalgie. A la lueur du feu ou des bougies, nos esprits s'échappent le temps d'une chanson. La poésie du luth de Thomas Dunford, redonne aux étoiles et au silence, ce sentiment intime d'un refuge musical. L'acoustique chaleureuse de la Bibliothèque de Versailles participe à l'étrange sentiment de bien être que nous offre ici les musiciens. Une lumineuse légèreté, semble émaner de chaque pièce réunie ici.

Le livret et le soin apporté à la pochette, rendent hommage avec clarté et intelligence à "l'imprimeur et libraire du roi en musique", de ce roi qui fût considéré en son temps comme le Restaurateur des Arts et des Lettres.

1 CD L'Encelade - Pierre Gallon, claviorganum & virginal. Freddy Eichelberger, claviorganum & virginal (pistes 13, 17,26) et Thomas Dunford, luth (pistes 7,8, 27). Enregistré les 6 et 10 mai 2013 dans la Galerie des Affaires Etrangères de la Bibliothèque de Versailles. Durée : 65'54''. Livret Français/Anglais. Réf : ECL 1301. Code barre: 3 760061 15667


Droits photographiques : Bibliothèque de Versailles © DR

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Bonne année 2014

31 Décembre 2013 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Divers


Fontfroide-152.JPGJe voulais à l'aube de l'année nouvelle et alors que je m'apprête à m'absenter pour 48 heures, d'abord vous remercier chères lectrices et lecteurs qui de France et de contrées lointaines qui me font rêver, me faites l'honneur de prêter quelques attentions à ce que je souhaite partager avec vous... Une musique du coeur et de l'âme.
 
Je tiens aussi à remercier les artistes et les attachés de presse qui tout au long de l'année 2013, m'ont offert des instants merveilleux, qui ont enchanté mon quotidien.
 
L'année 2013 me fut belle et ne pas le reconnaître serait profondément injuste. Mais je sais aussi que beaucoup d'être humains, ainsi que notre environnement, souffrent. Il m'est impossible de l'oublier, car je me sens profondément citoyenne de ce monde.
 
La beauté est là pourtant à notre portée. Alors c'est avec les mots des poètes, et quelques photos prisent en 2013 que je viens aussi ici, avec certes du coup un peu d'avance... -et j'espère que vous ne m'en voudrez pas pour cela-, vous souhaiter une très belle année 2014. Puisse-t-elle vous apporter tout le bonheur que vous en espérez. J'espère que la musique sera pour vous une source de joie et d'harmonie.
 
Fontfroide 244La terre est bleue comme une orange
Jamais une erreur les mots ne mentent pas
Ils ne vous donnent plus à chanter
Au tour des baisers de s’entendre
Les fous et les amours
Elle sa bouche d’alliance
Tous les secrets tous les sourires
Et quels vêtements d’indulgence
À la croire toute nue.
Les guêpes fleurissent vert
L’aube se passe autour du cou
Un collier de fenêtres
Des ailes couvrent les feuilles
Tu as toutes les joies solaires
Tout le soleil sur la terre
Sur les chemins de ta beauté.
Paul Eluard, L’amour la poésie, 1929

Mediterranee "La Méditerranée a toujours été ce creuset où ce sont des rencontres, des échanges qui pourraient se faire / l’or de la pensée enfin vraie si obstinément désirée et si constamment trahie par la société humaine » Yves Bonnefoy.... "

C'est très important le rire, il brise le mur de la peur, de l'intolérance et du fanatisme." Tahar Ben Jeloul
 
"Mon Dieu ! Donnez-nous une passion ! Qu’elle vienne de l’étrange ou de l’inconnu, qu’elle soit forte et belle, qu’elle fabrique du bonheur ou de la folie, mais qu’elle soit là sur notre chemin, tant que nous avons l’énergie de défier les impossibles, d’imaginer le rêve et d’en être jusqu’à la fin." Tahar Ben Jeloul

Merci à tous.
Monique Parmentier
 
Rome 2013 196Le Cancre

Il dit non avec la tête
mais il dit oui avec le coeur
il dit oui à ce qu’il aime
il dit non au professeur
il est debout
on le questionne
et tous les problèmes sont posés
soudain le fou rire le prend
et il efface tout
les chiffres et les mots
les dates et les noms
les phrases et les pièges
et malgré les menaces du maître
sous les huées des enfants prodiges
avec les craies de toutes les couleurs
sur le tableau noir du malheur
il dessine le visage du bonheur. 
Jacques Prévert
 
 
 
 
 
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Orient-Occident II : Un cri, un chant d'amour dans le désert

28 Décembre 2013 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Chroniques CD

orient_occident_2.jpgOrient-Occident II : hommage à la Syrie

Jordi Savall - Hespérion XXI

Alia Vox

C'est avec un nouvel album d'Alia Vox, le tome II d'Orient-Occident que je peux et souhaite terminer 2013.

L'année dernière à la même époque ou presque, Jordi Savall nous offrait le livre/CD Pro Pacem. Rien n'a changé depuis, malgré ce magnifique plaidoyer pour la paix et le dialogue inter-culturel. Aujourd'hui et depuis plusieurs mois, des massacres sont perpétrés en Syrie, sans que l'Occident ne puisse trouver de réponse à l'appel au-secours du peuple syrien, ni d'ailleurs à celui de tous ceux qui nous proviennent des quatre coins de la planète, partout où les droits les plus fondamentaux des êtres humains sont violés.

waedbouhassoun02.jpgCe nouveau CD est l'occasion de nourrir encore et toujours cet appel à la raison et au partage, à la compréhension et à l'ouverture qui parcourt la vie du maestro catalan. Il nous permet de découvrir, un peuple par sa musique et sa poésie, par sa culture qui est la source de celle de l'Occident. Jordi Savall, artiste pour la paix de l'Unesco reprend son bâton de "pèlerin", pour rassembler autour de lui, dans un même objectif, celui de donner la parole à un peuple qui souffre, des artistes de toutes les origines du pourtour méditerranéen. Parmi eux, une chanteuse et musicienne syrienne qui nous a profondément marqué l'été dernier à Fondfroide : Waed Bouhassoun. Sa voix mystérieuse, aux accents sombres, doloristes et mélancoliques, nous avait bouleversé par son interprétation d'un chant syrien issu du désert et de la souffrance : Qalaq (Angoisse). Cet air figure aujourd'hui dans ce CD, comme d'autres poèmes syriens mis en musique, dont les volutes expriment tout à la fois toutes les émotions humaines, communes à tous les peuples et qui devraient nous rassembler : amour, joie, chagrins. Tout ici, nous ramène au cœur de ce qui fait la civilisation.

jordi savallDans le superbe livret qui accompagne ce nouveau CD, Jordi Savall nous offre à méditer cette citation de Milan Kundera issu de son Livre du rire et de l'oubli : "L'assassinat d'Allende éclipsa rapidement le souvenir de l'invasion russe de la Bohême, la tuerie sanglante du Bangladesh fit oublier Allende, la guerre du désert du Sinaï fit taire les pleurs du Bangladesh, la tuerie du Cambodge fit négliger le Sinaï, et cetera et cetera, jusqu'à l'oubli complet de tout par tous".

Les différents textes du livret enrichissent notre rapport à la musique, en nous rappelant certains des grands enjeux géo-politiques et humains, ainsi que les informations liées à cette guerre. Cela s'avère d'autant plus indispensable, que bien souvent nous sommes passés à côté, la tête enfouie dans nos soucis quotidiens et notre terreur viscérale de voir tôt ou tard ce conflit, comme d'autres avant lui, déborder sur l'Europe en paix.

Pourtant les chiffres parlent d'eux-mêmes et il y a urgence à ouvrir les yeux : "Aujourd'hui plus de 100 000 personnes sont mortes dans ce conflit, d'après le Secrétaire Général des Nations Unies, plus de 6 millions d'enfants sont affectés par d'immenses souffrances, 3,1 millions de jeunes touchés par le confit, quatre millions de personnes déplacées dans le pays et deux millions de réfugiés dans les pays voisins". Aussi terrifiant que soient ces chiffres, aussi nécessaire que soit l'indignation qu'ils ne peuvent que provoquer, rien pour l'instant ne semblent engendrer de réponses adéquates. Que faire ? Seul le peuple syrien peut guider l'Occident vers la solution à son désespoir. Encore faut-il l'entendre pour le comprendre. En attirant l'attention sur la beauté de l'univers syrien, Jordi Savall tente de favoriser une écoute et un dialogue.

39_Bayad.jpgLe répertoire retenue pour composer ce programme est d'un équilibre subtil, d'une noblesse altière et d'une splendeur bouleversante. Il est fait de musiques issues des cultures si proches et pourtant si lointaines du pourtour méditerranéen. Danses, prières, chansons, nous transmettent la perception de cet univers étrange et fascinant, où une poésie élégiaque et des douleurs absolues se côtoient. Les émotions s'y expriment avec pudeur et une sensibilité à fleur de peau.

Aux côtés de Jordi Savall, on trouve non seulement Waed Bouhassoun qui s'accompagne à l'Oud, mais également Moslem Rahal un flûtiste syrien (ney) virtuose et d'autres chanteurs et musiciens dont les instruments sont tous d'origines méditerranéennes et/ou orientales. Le Maroc, l'Italie, Israël, le Liban, la Turquie se trouvent ainsi rassemblés pour partager les plus belles valeurs qui soient. Un étrange envoûtement s'empare de nous en les écoutant. Cette musique nous ramène sur le bord de l'Euphrate, dans ces villes ensorcelantes toujours vivantes ou disparues - Damas, Bagdad, Alep... Mari, Babylone - là où sont nos origines.

po_etendart_ur.jpgCar c'est sur les rives de ce fleuve qu'est né l'agriculture,- ce dont témoignent les graines fossilisés du blé que les archéologues y ont retrouvés-, mais également l'écriture, l'alphabet et les premières bibliothèques. Dans ce pays vécurent les plus grands poètes arabo-islamiques. C'est en Syrie que sont nés les Mille et une nuits. 

L'éloquence des chanteurs fait renaître des jardins aux senteurs captivantes. Tous nous subjuguent par la pudeur et la distinction raffinée de leur engagement et de leur phrasé. Jamais l'angoisse n'a semblé aussi ténébreuse ni la pluie aussi sensuelle. Le timbre troublant de Waed Bouhassoun nous emporte dans ces univers sombres et mystérieux, où les vents du désert font miroiter les illusions, tandis que celui du chanteur Israélien Lior Elmaleh nous séduit par sa beauté apaisante et secrète. Le timbre lumineux de Oumeima Khalil est quand à lui une eau bienfaisante, quant à la voix rauque d'Haman Khairy, elle fait résonner comme un appel à la prière le désir de paix, confronté à l'amertume des amours trahis. Seul, en duo ou en trio, voici donc quatres artistes remarquables, dont la noblesse du chant est à l'image des enchantements et de l'âpreté de cet Orient. Elle évoque la soie et les parfums de ses souks animés, ces voyageurs venus de tous les coins de l'horizon qui se croisent sur des chemins de sable, rêvant d'un ailleurs où se partagerait l'ivresse de l'harmonie.

Driselmaloumi.jpgLes musiciens sont bien plus que de simples accompagnants, offrant une ligne de chant créative et captivante aux chanteurs. Jordi Savall nous offre ici une palette sonore chatoyante. La magie et l'intense vibration des couleurs d'Hespérion XXI, sont la chair et le sang des émotions. Le Ney et les flûtes de Moslem Rahal et Pierre Hamon se font ductiles et ensorcelantes. A l'Oud, Driss el Maloumi fait résonner dans des improvisations virtuoses, les eaux cristallines des oasis et la caresse du soleil du soir. La suavité de cet instrument intime est un appel à la méditation et à la rêverie que le musicien marocain partage avec Yair Dalal et Waed Bouhassoun. La limpidité céleste du santur et du qanum, est comme un voile diapré aux mille et un reflets. Tandis qu'aux percussions Pedro Estevan et Erez Shmuel Mounk nous font entendre le "battement vital" des âmes en dérive.

La direction généreuse et charismatique de Jordi Savall et son interprétation fine, irradiante, dramatique de la vièle et du rebab, dont il nous fait découvrir les trésors d'expressivité, nous invite au cœur d'un ailleurs, où enfin l'Harmonie et la paix régneraient. Cet ailleurs, a bien souvent eu pour nom chez des femmes et des hommes de culture : la Syrie.
 

Photo-iphone-529.JPG"Toute personne civilisée dans le monde à deux patries : son pays d'origine et la Syrie" André Parrot (1901-1980). "J'aime ce doux pays fertile et ses gens simples qui savent rire et profiter de la vie, qui sont indolents et joyeux, qui ont de la dignité, de la courtoisie, un grand sens de l'humour et pour qui la mort n'est pas si terrible". Agatha Christie

Comment conclure, si ce n'est en vous invitant grâce à ce CD, à renouer avec vos racines et surtout à ne pas renoncer à demander, à exiger la fin de tout compromis avec ceux qui détruisent, massacres chaque jour des enfants, des femmes et des hommes. Leur seul crime est de demander une seule et essentielle chose, vivre libre et en paix. Jamais aucun CD n'aura autant exprimé le désarroi de tous ceux qui souffrent, qui ne veulent pas tuer, ni dominer, ni même s'enrichir de quelques pièces d'or et qui ne savent pas et ne veulent pas se servir des bombes et des fusils pour vivre. Jordi Savall donne avec courage voix à l'humanité souffrante. Aux pieds des oliviers, sur les rives de la Méditerranée si bleue, les bergers et les musiciens, se retrouvent ici pour nous conter l'extraordinaire beauté du monde. Merci Maestro. 

Par Monique Parmentier

1 CD Alia Vox - Orient - Occident II, Hommage à la Syrie.  Direction, vièle & rebab, Jordi Savall. Hespérion XXI -. Chant et oud, Waed Bouhassoun. Chant, Lior Elmaleh. Chant, riq & sonaja, Hamam Khairy. Chant, Oumeinma Khalil. Durée : 78'23'' - Enregistré à la Collégiale de Cardona (Catalogne) le 18 février et les 6, 8 et 9 mai 2013 par Manuel Mohino - Référence : ALIA VOX AVSA9000 - Code barre : 7 619986 39003

Droits photographiques : Waed Bouhassoun - Jordi Savall et Driss el Maloumi © DR - Musiciens - el "Histoire de Bayâd et Riyad", Espagne ou Maroc - XIIIème siècle © BA Vatican  - La Méditerranée © Monique Parmentier

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La Renaissance : un songe musical

25 Décembre 2013 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Chroniques CD

 

renaissance.jpgL'Europe musicale de la Renaissance Ricercar - Jérôme Lejeune

 

Voici donc mon cadeau de Noël à mes lecteurs, ma chronique d'un Livre/CD sorti chez Ricercar cet automne, consacré à une période que j'affectionne tout particulièrement.

Aujourd'hui lorsqu'on évoque la Renaissance, c'est à la peinture ou à la sculpture que l'on songe. Nous donner à entendre sa musique, c'est un peu redonner vie à un univers devenu muet, presque figé dans sa beauté plastique. 

La Renaissance occupe une place essentielle dans l'histoire de la musique, malheureusement bien trop méconnue. Elle va offrir à la période moderne ses genres, sa notation et sa place au cœur de la société. 

Cet automne aura donné l'occasion de retrouver tout à la foi la peinture, la sculpture et la musique de la Renaissance.   

Plusieurs expositions ont permis à un public nombreux, d'appréhender le monde tel que le voyait les femmes et les hommes à cette époque. On a souvent du mal aujourd'hui à se replacer dans ce contexte intellectuel que les découvertes des Amériques et de l'imprimerie vont fondamentalement bouleverser. Il est difficile d'imaginer, un monde où sont encore absents les livres qui ont, depuis le XVIe siècle, contribué à façonner notre manière de le penser.

 

les-noces-de-cana-dc3a9tail-musiciens-copie-2.jpgAvec le "Printemps de la Renaisance" au Louvre, c'est le passage du Moyen-Âge à la Renaissance, avec des œuvres de tout premier ordre, qui a été évoqué. Quant à celle du Musée du Luxembourg consacrée à "la Renaissance et le rêve", loin des platitudes écrasantes de la psychanalyse, elle nous a livrée une autre manière de rêver, d'idéaliser, de craindre aussi l'inconnu. Un inconnu d'autant plus importants que les sciences modernes plus que balbutiantes, n'ont alors pas encore révélées l'existence de l'infiniment petit et de l'infiniment grand. La moindre découverte, ou remise en cause des écrits bibliques, pouvait à cette époque, vous envoyer au bûcher. D'autres expositions plus discrètes, mais tout aussi passionnantes ont complété ce nouvel intérêt pour la Renaissance.

Mais il manquait un art essentiel, jamais évoqué dans toutes ces grandes expositions. Un art éphémère qui ne nous a laissé que des traces fragiles, qu'il faut bien souvent reconstituer. C'est ce à quoi, ce nouvel album édité chez Ricercar et une exposition au Musée d'Ecouen - "Un Air de Renaissance"-, tentent de palier avec rigueur et passion. Si l'exposition se termine le 6 janvier, le catalogue qui nous en reste est à lire absolument.
 

BD_affiche_AirRenaissance.jpgLe livre CD chez Ricercar vient donner des pistes d'écoute, afin de mieux faire connaître les grands compositeurs et courants de la musique Renaissance. Il est d'autant plus important d'attirer votre attention sur ce magnifique album, que l'on peut à juste titre considérer quelle est aujourd'hui un des parents pauvres de la musique ancienne. 

Qui mieux que Jérôme Lejeune pouvait se livrer à un tel exercice ? Il nous livre ici en une série de 8 CD, un aperçu très bien fait, permettant à tous ceux qui ne connaissent pas ou peu cette musique de l'entendre sans a priori. Ce livre CD ne peut qu'aiguiser votre curiosité et vous donner envie d'en savoir plus. S'appuyant tout à la fois sur son catalogue aux références loin d'être négligeables et sur un partenariat  avec d'autres labels, il  dispose ici d'une palette importante du répertoire Renaissance tout en l'accompagnant d'un livret à l'approche agréablement érudite. Quelques pièces ont été tout spécialement enregistrées pour l'occasion par Vox Luminis.

Si l'on peut regretter l'absence de jalons chronologiques qui permettraient de resituer dans l'histoire les extraits musicaux qui vous sont proposés et peut - être une part un peu trop large donnée au passage de la Renaissance au baroque dans certains genres, ce livre CD nous montre l'évolution de la musique sur l'ensemble des territoires européens.  

Dans une période d'une très grande instabilité politique et de grandes réformes religieuses, où la violence est partout, la musique accompagne la vie et la mort de tout un chacun. Si elle se développe en Italie, c'est bien en Flandres qu'elle voit le jour. Ses compositeurs venus du Nord trouvent auprès des cours italiennes un écho à leurs recherches et un public à l'écoute de la nouveauté. Partout ailleurs en Europe, ces musiciens flamands qui voyagent, de l'Allemagne à l'Angleterre en passant par l'Espagne et la France, vont susciter des vocations.  

L'artiste à l'image de Donatello affirme sa place dans la société et des compositeurs de renom vont laisser une trace primordiale dans l'histoire de la musique.  Il en est ainsi de Josquin des Prés et Roland de Lassus, auxquels cet album consacre une large part.

 

francesco.jpgTout comme les autres formes d'art et particulièrement la sculpture, la musique, redécouvre l'antique, pour mieux l'imaginer. Elle va ainsi inventer de nouvelles formes. Elle va ouvrir un dialogue avec la poésie, et créer le madrigalisme qui tout au long du XVIe siècle va s'épanouir, jusqu'à donner naissance à l'opéra. Elle voit  naître et se développer une pratique musicale au sein des familles aisées, nobles et bourgeoises. Elle le doit à l'édition musicale, qui voit le jour à Venise au début du XVIe siècle. Elle peut se déployer, voyager et  entrer dans les foyers. Les instruments évoluent également et s'enrichissent en raison même de cette pratique musicale élargie.

On remarquera, l'absence de certains compositeurs en particulier pour le luth, tel Francesco da Milano Il Divino. Lorsqu'on sait combien cet instrument est familier à la Renaissance, on aurait aimer lui voir consacré plus d'extraits musicaux. La musique d'Il Divino n'est-elle pas celle de Raphaël ?

Nous espérons que ce CD et cette exposition à Ecouen, donneront l'idée aux organisateurs des grandes expositions, de faire dialoguer les arts dans leur ensemble afin que le public puisse entendre cette musique qui a accompagné tous les artistes de la Renaissance à travers l'Europe.

Ce livre CD est une très belle invitation à découvrir les grandes notions de base de l'Europe musicale du XVIe siècle. Par l'intelligence de sa démarche, vous n'aurez plus qu'une envie parfaire vos connaissances de cet univers sonore à l'âme généreuse, curieuse, brillante et si humaine.
 

Par Monique Parmentier

8 CD Ricercar - Durée totale : 10h35 - Livret : français/anglais - Réf : RIC106 - Code barre : 5 400439 001060

 

Ensembles : Ay Luna - Cantus Cölln - Capilla Flamenca - Capella Amsterdam - Capella Mediterranea - Capella Prratensis - Choeur de chambre de Namur - Clematis - Clollegium vocale Gent - Ensemble Daedalus - Deller consort - Doulce Mémoire - Ensemble Céladon - Ensemble Clément Jannequin - Ensemble Leones - Ensemble Mare Nostrum - Ensemble vocal européen de la Chapelle Royale - Flanders recorder Quartet - Huelgas Ensemble - La Caccia - La Colombina - la Fenice - La Morra - Le Concert Spirituel - Le miroir de musique - Ludus modalis - Mezzaluna - odhecaton - Ricercar Consort- Romanesque - Syntgama amici - Che Choir of Magdalen college - Vox Luminis

Solistes : Leon Berben - Pascale Boquet - James Bowman - Paulin Bündgen - Delphine Collot, Clara Coutouly - Imke David - Alfred Deller - Hannelore Devaere - Vincent Dumestre - Thomas Dunford - Jean Ferrard - Bernard Foccroule - Susan Hamilton - Siere Henstra - Rolf Lislevand - Wim Maeseele - Philippe  Malfeyt - Frédéric Martin  - Carles Mas - Guy Penson - Christina Pluhar - Liuwe Tamminga - Jean Tubéry - Jan van Outryve - Sergio Vartolo - Joris Verdin


Droits photographiques :Les Noces de Cana de Véronèse © Le Louvre ; Portrait d'un luthiste (peut-être Francesco da Milano © DR ; Affiche de l'exposition "Un air de Renaissance" © Musée d'Ecouen

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